Les services numériques sont en premier lieu des logiciels. Leur nature est donc du code informatique, même si on ne peut en aucun cas les réduire à cette essence.
Les règles applicables à un code source sont formalisées par des licences, c’est-à-dire des contrats par lequel le titulaire des droits d'auteur définit les conditions dans lesquelles ce programme peut être utilisé, diffusé ou modifié. Certains types de licences, les licences libres, garantissent des droits au public : lecture, duplication, redistribution. Ces droits empêchent donc la réappropriation de l’existant.
Néanmoins, les communs numériques ne peuvent être réduits à un logiciel. Comme on l’a vu, leur spécificité provient de l’existence d’une communauté. C’est bien cette communauté rassemblée autour du logiciel qu’il faut préserver pour éviter la réappropriation, active ou par désertion de la communauté à l’exception d’un acteur.
La réappropriation active ne peut être empêchée que par la mise en œuvre d’une clause de repartage [Aigrin, 2002]. Une telle clause garantit que des améliorations apportées au logiciel sont mises à disposition de la communauté, en rendant obligatoire la publication des modifications du code source. En l’absence d’une telle clause, il suffit de reprendre le code source de logiciels constituant des communs numériques et d’y ajouter une fonctionnalité attirante pour les utilisateurs sans partager le code qui ajoute cette fonctionnalité [Aigrin, 2002] pour déplacer la communauté vers cette nouvelle version [Verdier & Murciano, 2015] qui n’est plus gouvernée par un commun, vidant de ce fait les communs originaux de leur substance. Une licence de repartage est donc la plus adaptée au cas des communs contributifs.
Au-delà de l’usage, la capacité des usagers à contribuer au service doit être préservée. L’usage de licences libres garantit le droit de modifier le code, mais la contribution signifie également l’évaluation systématique de ces modifications et leur intégration chaque fois que cela s’avère pertinent. Sans cette capacité à contribuer, les logiciels libres ne sont qu’une nouvelle forme de monologue.
Au même titre que l’usage, la « contribuabilité » des communs ne saurait être mesurée par la seule capacité technique à solliciter l’intégration de modifications. Un contributeur dont les sollicitations ne sont jamais traitées sera rapidement frustré et cessera de contribuer, et la visibilité publique de cette absence de réponse en découragera d’autres.